Nous sommes arrivés aux Canaries le 8 janvier 2022 , après 4 jours et demi de navigation depuis Lisbonne, Portugal (cf. précédent article).
L'archipel se compose de 7 îles principales (cf. carte) réparties administrativement en deux provinces : celle de l’Est avec pour capitale Las Palmas (Gran Canaria) et celle de l’Ouest avec pour capitale Santa Cruz de Tenerife (Tenerife).
Ces îles d'origine volcanique ont été originellement habitées par les Guanches qui se sont fait "grand remplacer" à la fin du 15ème siècle par d’innocents colons espagnols avides de nouveaux territoires à conquérir par delà les Océans.
Aujourd’hui encore, les Canaries demeurent une étape incontournable pour tous les navigateurs qui souhaitent rallier le continent américain depuis l’Europe.
Nous avions déjà partiellement visité certaines de ces îles lors de notre premier passage il y a 5 ans (novembre 2016).
Au cours de cette « nouvelle » escale, nous avions très envie d’approfondir notre connaissance de l’archipel en partant à la découverte d’autres îles.(cf. carte)
C’est ce que nous avons fait dès notre arrivée en abordant les côtes de la Graciosa.
LA GRACIOSA
Paradis des surfeurs coté Ouest et réserve marine côté Est, la Graciosa n’offre que deux options pour les voiliers de passage : jeter l'ancre devant la "Playa Francesa" au Sud ou s'amarrer dans le petit port de "Caleta del Sebo" à l'Est.
Côte Ouest
Cöte Est avec les montagnes de Lanzarote à l'arrière plan
Côte Est
Nous avons testé les deux, la "Playa Francesa" d’abord où nous avons pu goûter pour la première fois depuis la reprise de notre voyage au « plaisir » du snorkeling dans des eaux certes cristallines mais encore un peu fraîches (20° C) à notre goût.
Mouillage de la Playa Francesa
Sous l'eau, poissons trompette, demoiselles, sars, perroquets... étaient au rendez-vous ainsi ... qu'un mouillage complet (une ancre avec ses 50 m de chaîne et son câblot ! ) abandonné par 12 mètres de fond. Nos efforts pour le remonter à bord n’ont pas été vains puisque par la magie d’internet nous avons réussi à retrouver son propriétaire et à nous organiser pour qu’il puisse récupérer son précieux bien.
Ce mouillage abandonné en catastrophe témoigne du caractère inconfortable voire dangereux de la Playa Francesa par vent de secteur Est/Sud-Est, à l'instar de la plupart des mouillages des Canaries qui offrent très peu de protection pour ce régime de vents.
C’est pourquoi lorsque le vent a tourné Sud-Est nous avons préféré aller nous abriter dans le petit port voisin de Caleta del Sebo.
Caleta del Sebo
Caleta del Sebo
Caleta del Sebo
Relativement épargnés par la houle, nous avons tout de même essuyé entre 40 et 50 noeuds de vent pendant plus de 3 jours sans discontinuer alors que la météo en annonçait seulement une vingtaine. L'explication vient de la zone d’accélération du vent que créent les reliefs de Lanzarote surplombant la Graciosa.
Caleta del Sebo au pied des montagnes de Lanzarote
Après avoir profité d'une acalmie pour nous échapper de cette centrifugeuse qu'était devenu le port de la Graciosa, nous avons fait cap vers Gran Canaria puis Ténérife où nous avons cherché avec plus ou moins de succès des mouillages protégés d'un vent et surtout d’une houle de Sud-Est puis Sud-Ouest.
Rade de la Sardine, Gran Canaria
Los Cristianos, Tenerife
Baiha da Abona, Tenerife, protégée du Sud-Ouest, avec le Teide enneigé à l'arrière plan
En attendant des conditions plus favorables pour mettre le pied à terre, nous nous sommes consacrés comme toujours aux multiples travaux d'entretien inhérents à la vie sur un voilier.
Réparation du Gennaker
Préparation du régulateur d'allure pour la prochaine modification
Passage de messagers dans le mât
Ou quand changer une ampoule n’est plus un simple jeu d’enfant...
Nous avons ensuite passé une courte semaine à Las Palmas (Gran Canaria) pour récupérer la matière première nécessaire à la re-re-re-réparation de notre régulateur d'allure et organiser la livraison future de nos nouvelles voiles (bien qu’appartenant à l’UE, les Canaries appliquent un régime douanier particulier qui complique sérieusement l'acheminement de certains colis depuis le reste de l’Europe).
Puis nous nous sommes mis en route vers El Hierro, l'île la plus méridionale et occidentale de l'archipel.
EL HIERRO
El Hierro est aussi surnommée Isla del Meridiano car c’est là que fut placé au 17ème siècle le méridien d’origine avant qu’il ne soit remplacé par celui de Greenwich. Un peu à l’écart du reste de l’archipel, c’est l’île la moins peuplée et peut-être la moins dévoyée par l'industrie du tourisme.
Nous avons accosté dans le petit port de la Restinga, au Sud de l'île.
Un port si propre qu'il n'est pas rare d'y croiser tortues, diodons, mérous...
Lorsque nous débarquons dans un nouvel endroit, parfois, sans que nous puissions vraiment nous l'expliquer, nous nous y sentons tout de suite extrêmement bien. C’est ce que nous avons ressenti à La Restinga qui fait indéniablement partie de ces endroits magiques et apaisants où nous avons eu la chance de faire escale.
Pendant une dizaine de jours, nous avons joui de la tranquillité de cette petite bourgade, exploré les paysages contrastés et souvent grandioses que proposent les différents versants de l'île, et découvert des formations volcaniques étonnantes sur terre comme sous l'eau, notamment dans la réserve marine de La Mar de Las Calmas où nous avons fait deux belles plongées.
A l'Est de la Restinga
El Pinar
El Golfo
Tigaday
Depuis le point culminant de l'île : vue sur La Palma à gauche et La Gomera et Tenerife à droite à l'arrière plan soit une visibilité extraordinaire de plus de 80 miles ! (150 km)
Montana de Orchilla
Coulées de lave
Aeonium, plante endémique des Canaries qui pousse au milieu des champs de lave
Tunnel de lave long de plus de 300 m à proximité du Faro de Orchilla
Dessin des fonds marins de La Restinga, régénérés par des éruptions volcaniques en 2011
(Pour découvrir en 3D les sites de plongée de cette réserve marine, n'hésitez pas à consulter le site https://ilovetheworld.es/tour/puntarestinga/puntarestinga.html)
Jean-Luc a également pu utiliser le chantier du port pour remettre à nu le safran auxiliaire du régulateur qu'il avait fabriqué au Portugal, puis installer un nouvel axe en tube plein, puis ressouder les pattes, puis re-résiner, puis puis puis... puis remonter l'ensemble.
Si bien que lorsque nous avons quitté El Hierro, nous avions de nouveau un régulateur comme neuf...
Nous n'avons pas pu le tester immédiatement faute de vent. Au cours de la navigation monotone quasi exclusivement au moteur vers la Gomera, nous avons tout de même eu la chance de croiser un banc de dauphins, comme ce fut d'ailleurs souvent le cas au cours de toutes nos navigations aux Canaries.
LA GOMERA
Si vous voulez faire de superbes randonnées, améliorer votre allemand, ou tenter l'expérience hippie, alors la Gomera est faite pour vous.
La Gomera est une île dont le relief montagneux se découpe en de nombreuses vallées encaissées. Pour communiquer entre ces vallées, les Guanches avaient développé un langage sifflé, le Silbo, qui s'est transmis jusqu'à nos jours si bien qu'il a été inscrit en 2009 par l'UNESCO sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l'humanité. (Le film "La Gomera les Siffleurs" du réalisateur de la nouvelle vague hongroise Corneliu Porumboiu était en compétition au festival de Cannes de 2019 et est actuellement visible sur ARTE replay)
Outre ce langage sifflé si particulier, les Guanches ont également transmis à nos contemporains la technique du Saut du Berger ou "Salto del Pastor" qui consiste à gravir ou descendre les vallées escarpées à l'aide d'une longue perche de bois terminée par une pointe métallique. https://canariestourisme.com/le-saut-du-berger-canarien/
Berger croisé au cours d'une de nos randonnées
Depuis les mouillages de Playa Santiago et surtout de Valle Gran Rey, nous avons fait de superbes randonnées au cours desquelles nous nous sommes exercés à gravir plusieurs centaines de mètres de dénivelés.
Randonnée entre Playa Santiago et Targa
Randonnée entre Playa Santiago et Targa
Mouillage devant le port de Vueltas à Valle Gran Rey
Mouillage devant le port de Vueltas à Valle Gran Rey
Randonnée de El Guro à Tequergenche
Randonnée de El Guro à Tequergenche
Randonnée de El Guro à Tequergenche
Vue sur le mouillage de Valle Gran Rey et Pythéas, depuis le sommet de Tequergenche
Randonnée entre La Calera et Arure
Randonnée entre La Calera et Arure
Randonnée entre La Calera et Arure
Randonnée entre La Calera et Arure
Nous pensions être ainsi prêts pour tenter l'ascension du Teide, point culminant de Ténérife mais nous avons du malheureusement renoncer à ce projet en raison de chutes de neige qui ont entraîné la fermeture de l'accès au Teide précisément le jour où nous avions prévu d'y grimper.
A cette déception s'est ajoutée celle d'apprendre que le fameux carnaval de Ténérife (le 2ème après celui de Rio) était reporté au mois de juin pour cause de Covid...
Après une brève escale de 3 jours à Santa Cruz de Ténérife, nous avons donc repris notre route vers Gran Canaria où nous espérions rapidement recevoir nos voiles.
Nous sommes retournés mouiller devant la capitale de l'ile, Las Palmas pour attendre leur livraison, 2 semaines et demi plus tard...
Après Maubeuge, Las Palmas est la ville la plus moche que je connaisse. Je ne m'appesantirai donc pas plus longuement sur cette escale "forcée" au cours de laquelle nous n'avons pas fait beaucoup de tourisme. Il faut dire que nous avons été bien occupés pendant ces deux semaines d'attente à préparer nos futures étapes : étude des guides nautiques, confection de moustiquaires, rendez-vous médicaux pour obtenir un traitement anti-paludique, pleins de gaz, de gasoil, d'eau, avitaillements conséquents pour la transat, préparation de bocaux, réparation de la trinquette, réparation de la pompe à eau, changement de l'anti-dérapant,... et enfin : réception de nos voiles !!!!!!
Samedi 12 mars 2022, alors que nous venions à peine de récupérer nos deux dernières voiles, nous quittions les Canaries.
Direction ? Le Sénégal, 900 miles plus au Sud, toujours plus au Sud...
Infos pratiques pour les navigateurs :
Navigation
Aux Canaries en hiver le vent dominant est un vent de NE.
Les navigations sont parfois compliquées par des effets de site liés aux reliefs des îles : zones d’accélération qui peuvent apporter de soudaines rafales quand on pensait qu’il n’y avait pas beaucoup de vent, zones de dévente au Sud des îles, houle cassante d’Est, etc…
Il est conseillé de naviguer d’Est en Ouest. Si on veut le faire dans l’autre sens, il faut essayer de le faire dans le sens des aiguilles d’une montre.
Ports et mouillages
Il existe de nombreux mouillages aux Canaries mais ils sont souvent exposés à la houle et donc inconfortables. Par vent d’Est ou de Sud, ils peuvent même être dangereux.
A Las Palmas, le mouillage est devenu payant (2€ par jour pour notre bateau de 11,84 m) en échange d’un accès au quai devant la capitainerie pour l’eau et l’électricité et d’un accès aux douches. Il n’est autorisé d’y séjourner que de la mi-septembre à la mi-mars.
Les ports constituent souvent un meilleur abri mais ils sont très fréquentés en pleine saison et il faut donc bien anticiper une réservation surtout lorsque du mauvais temps est annoncé car tout le monde veut alors y aller en même temps. Il existe deux types de port : privé ou public. Les ports publics (Puertos Canarios) sont beaucoup moins chers. Il faut souvent réserver à l’avance via leur site internet.
https://solicitudes.puertoscanarios.es/es_ES/ListaEspera/Inscripcion
Sans cette réservation et la confirmation de cette réservation, l’entrée dans le port vous sera parfois refusée même par mauvais temps !
Pour notre voilier de 11,84 m nous avons payé 14 euros/jour dans les Puertos Canarios. Dans les marinas privées, il faut compter entre 25 et 35 euros/jour.
Expéditions depuis l’Europe
Comme évoqué plus haut dans l’article, les Canaries appliquent un régime douanier particulier qui complique et peut retarder l’acheminement de certains colis depuis l’Europe.
Nous nous sommes fait livrer des voiles neuves Hors-Taxe depuis la France et l’Espagne. Pour être sûrs qu’elles ne restent pas coincées en douane, nous sommes passés par un agent local. Grâce à lui, les formalités douanières ont été expédiées en moins de 24h et il a réussi à faire valoir notre statut de voilier en transit vers une zone hors UE pour nous obtenir une exemption de taxe.
Le transport a été également géré par son intermédiarire mais cela a pris beaucoup de temps : le colis en provenance de la France a mis presque 3 semaines à arriver et celui en provenance d’Espagne un peu moins de 2 semaines.
Ses services nous ont coûté 90 euros par colis + les coûts du transport : 246 € + 36 € d’assurance pour un colis de 35 kg et 0,15 m3 depuis la France, 125 € + 36 € d’assurance pour un colis de 25 kg et 0,15 m3 depuis l’Espagne.
Pour nous, l’opération a été rentable car grâce à l'économie de la TVA en France et en Espagne et grâce à l'exemption de taxe aux Canaries sur des voiles neuves et donc onéreuses, nous étions gagnants malgré le coût important de l’expédition. Pour d’autres types d'envois ou de marchandises, le calcul mérite d’être fait…
Notre contact :
Gaz
Nous utilisons une bouteille de gaz de 13 kg. Nous avons voulu la faire recharger lorsque nous étions à Gran Canaria. La seule solution est d’aller en voiture à l’usine de gaz de DISA, plusieurs kilomètres au Sud de Las Palmas.
C/ LABRADOR, No 3
POLÍGONO INDUSTRIAL DE SALINETAS MUNICIPIO DE TELDE.
LAS PALMAS DE G.C.
Malheureusement, comme la date de ré-épreuve n’était pas lisible sur la bouteille, ils ont refusé de nous la remplir.
Nous avons été contraints d’en racheter une neuve. Dans une station Repsol, cela nous a coûté 20,76 €, contrat compris.
Point Covid
En tant que voilier et équipage français, lors de notre arrivée aux Canaries en Janvier 2022, nous n’avons eu aucune formalité d’entrée à effectuer ni aucune quarantaine, test PCR ou preuve de vaccination à fournir.
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