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Sénégal - 2ème partie : Saloum et Casamance

Après avoir fait connaissance avec la trépidante Dakar, nous avons eu envie de changer d’ambiance en allant naviguer sur le Saloum, situé à 60 miles (110 km) au Sud de la capitale.



Samedi 26 mars 2022, nous quittions dans la matinée la baie de Dakar, slalomant entre les filets et évitant de justesse de nous emmêler dans l’un d’eux.

Pour nous assurer une arrivée de jour dans le Saloum, nous avons pris l’option de jeter l’ancre pour la nuit à mi-parcours à hauteur de Saly. Nous nous sommes enfoncés dans une véritable forêt de casiers et de filets de plus en plus épaisse au fur et à mesure que nous nous rapprochions de la côte pour trouver notre mouillage. Seul le jour qui tombait nous a alors dissuadé de faire demi-tour. Nous avons jeté l’ancre là où nous pouvions, sans réussir à nous tenir complètement à l’écart des casiers et du risque de finir dedans si l’ancre chassait pendant la nuit…

Heureusement il n’en fut rien, et après avoir traversé en sens inverse ce terrain miné le lendemain matin, nous avons retrouvé avec soulagement des eaux plus saines au large jusqu’à notre arrivée sous spi en fin d’après-midi devant le Saloum.

Nous avons troqué le spi contre le génois pour franchir sa passe d’entrée parfaitement balisée puis sommes allés jeter l’ancre entre l’île de Guior et de Guisanor.


Trace de Pythéas dans le Saloum


Grande Mosquée de Dinouar


Dionewar, côté île de Guior


Pointe de Dionewar, côté île de Guior


Dionewar, côté île de Guisanor


Pêcheurs à Dionewar



De la rencontre du fleuve Sine et du fleuve Saloum naît un delta composé d’une multitude d’îles.

Aux portes de l’Océan et sous l’influence des marées, ces îles sont habitées soit par des populations Sèrères-Nyominca au Nord soit par des populations Socé au Sud. La pêche, la culture du mil et de l’arachide, le tourisme participent majoritairement à l’économie de cette région. Le delta abrite également une faune très riche, particulièrement au niveau ornithologique.


Dauphins à bosse de l'Atlantique, ou dauphins de Sousa


Pélicans, cormorans, sternes, et autres limicoles...


Des paysages de mangrove ou de savane bordent les "bolongs” (= affluents du fleuve) qui serpentent entre ces îles.


Ces bolongs ne sont pas toujours cartographiés avec précision et il est parfois facile de se retrouver coincé sur un banc de sable lorsque l’on a un tirant d’eau (= profondeur du bateau sous la ligne de flottaison) aussi important que le nôtre (1,90m). À marée montante, les yeux rivés sur le sondeur, il faut progresser lentement en essayant de passer dans l’extérieur des courbes, là où le courant a creusé le plus la rivière… Mais comme pour toute règle il existe des exceptions, et le stress s'invite souvent à bord.

Grâce à Stan que nous avions rencontré au CVD et qui nous avait donné quelques-unes des ses traces GPS nous avons néanmoins réussi à nous aventurer jusqu’à Mar Lodj, sur l’ile de Mar.

Mar Lodj


Nous avons mangé chez l’habitant puis visité ce village sèrère où cohabitent musulmans, chrétiens et animistes.


Mar Lodj


Mar Lodj : Fromager et Caïcedrat entremêlant leurs troncs, symbole de la cohabitation harmonieuse des religions


Pythéas au mouillage devant Mar Lodj


Tantôt à la voile tantôt au moteur, nous avons remonté le Saloum jusqu’à Foundiougne en nous frayant un chemin entre les pirogues de pêche et leurs filets, les palangres, les casiers, ou encore les « moudiasses », dispositifs de pêche à la crevette.


Jeunes pêcheurs


Moudiasses


Pirogue à passagers sur la route de Foundiougne


Si elle fut autrefois un important port de commerce, Foundiougne n’a gardé aucune trace de ce passé prospère. Peut-être la récente inauguration de son pont (construit par les Chinois) viendra-t-elle re-dynamiser cette bourgade éteinte.


Pont de Foundiougne


Foundiougne


Foundiougne


Depuis Foundiougne, nous avons redescendu le Saloum pour explorer la pointe Sud-Est du Delta via les fleuves côtiers du Diomboss et du Bandiala. Malheureusement, nous n’avons pas réussi à contourner certains bancs de sable pour rejoindre le Diomboss et avons du nous résigner à faire demi-tour pour ressortir du Saloum par le même chemin qu’à l’aller.


Échouage ...


Vivement marée haute...


Nous avons fait escale devant le port de Djiffer en attendant la marée favorable pour sortir de la passe.


Port de Djiffer


Pêcheurs devant Djiffer


Pythéas au mouilllage devant Djiffer


Un second et ultime caprice de la batterie moteur nous a obligé à reporter notre départ de 24h. Par chance, nous avions une batterie de rechange ce qui a évité à Jean-Luc de s’arracher les cheveux pour modifier l’installation électrique.


Mercredi 6 avril 2022, nous avons quitté le Saloum en tirant un long bord au large afin d’éviter de croiser des pêcheurs pendant la nuit. 130 miles plus tard, au terme d’une navigation sans embûche, nous nous présentions le lendemain matin devant la Casamance. Après nous être débarrassés d’un reliquat de casier qui s’était accroché sous notre safran, nous nous sommes engagés dans sa passe également parfaitement balisée, et sommes allés jeter l’ancre devant Kachouane.


Trace de Pythéas en Casamance


Le fleuve Casamance donne son nom à la région qu’il traverse. Ce vaste territoire de 30 000 km2 est occupé par la tribu des Diolas. Une partie d’entre eux réclament leur indépendance depuis 1982. Pour combattre la rébellion armée et ses actions parfois violentes (enlèvements, meurtres …) l’État a déployé une importante force militaire dans la région et mène épisodiquement des actions répressives.

Le Sud de la Casamance où nous avons navigué est épargné par ces troubles.


Il y règne un calme enchanteur, la végétation est splendide et moins aride que dans le Saloum, la faune y est également très riche, et par-dessus tout les Diolas ont un sens de l’accueil absolument extraordinaire.


Il pleut du Kapok devant Elinkine


Rive du bolong menant au village d'Haer


Rive du bolong menant au village d'Haer


Baobab avec ses pains de singe


Paysage dans la forêt d'Haer


Paysage dans la forêt d'Haer


Pythéas au mouillage dans un bolong devant Haer


Pêcheurs encerclés par les dauphins et les oiseaux


Culture d'huîtres de mangrove


Dauphin Tursiop


Dauphins Tursiops


Ligne supérieure : Milan noir (Milvus migrans), Guêpier de Perse (Merops persicus), Grand cormoran (Phalacrocorax carbo), Ligne médiane : Rollier à ventre bleu (Coracias cyanogaster), Martin-pêcheur pie (Ceryle rudis), Perruche à collier (Psittacula krameri), Ligne inférieure : Barbican à poitrine rouge (Lybius dubius), Vautour charognard (Necrosyrtes monachus), Grande aigrette (Ardea alba)


De nombreux campements touristiques jalonnent les rives de la Casamance et de ses bolongs. L’hospitalité des Diolas s’y exprime pleinement.


Campement devant Haer


À Ehidj, petite île au sud d’Elinkine, nous nous sommes arrêtés devant le campement de Léon.


Pythéas depuis le village d'Ehidj


Pythéas au mouillage devant Ehidj


Par l’entremise de Caroline et Benoît un couple de navigateurs belges qui se sont installés depuis plusieurs années dans la région, nous avons été introduits auprès des habitants de l’île.

Pendant quelques jours, nous avons participé aux activités de la vie quotidienne comme si nous faisions partie des leurs. Ensembles, nous avons partagé le gâteau d’anniversaire de Jean-Luc (tout le monde mangeant à même le plat comme c’est la coutume ici) et avons même été invités à nous joindre à eux pour les fêtes de Pâques au cours desquelles toute la famille revient au village.


Rizières de l'île d'Essamet cultivées pendant l'hivernage par les femmes d'Ehidj


Rizières de l'île d'Essamet cultivées pendant l'hivernage par les femmes d'Ehidj


Vin de Palme "bounouk" tiré sur l'île d'Essamet par Alphonse, le chef spirituel des habitants d'Ehidj. Il sera ensuite dégusté au "cabaret", endroit où les hommes se retrouvent au pied d'un arbre au milieu de la brousse pour refaire le monde



Jamais depuis le début de notre voyage nous n’avions eu l’occasion de partager à ce point l’intimité des habitants d’un pays que nous traversions. Ces échanges nous ont offert une réelle leçon d’humanité et un enrichissement inestimable de notre voyage.

Le fossé culturel est grand et il n’est pas toujours facile de se mettre à la place de l’autre : comment comprennent-ils notre projet de vie nomade autour du monde, loin des nôtres, sur un bateau,… comment comprenons-nous la condition de ces Femmes qui ont la charge du foyer, des enfants, du travail agricole dans les rizières, des récoltes des huîtres dans la mangrove, mais qui n’ont ni droit à l’IVG, ni droit à la parole, ni droit à la garde des enfants lorsque leur mari décède, etc…

Néanmoins, nous avons l’impression de mieux connaître le Sénégal à travers notre immersion chez les Diolas qu’à travers toutes les lectures ou « visites touristiques » que nous aurions pu faire.


Au terme d’un trop court séjour en Casamance (12 jours), nous avions atteint la date limite de notre « passavant » et devions quitter le Sénégal.

Le bateau était recouvert de sable que nous avons renoncé à lessiver au fur et à mesure tant il en revenait chaque jour. Nous avons installé notre nouvelle GV (= Grand Voile) à poste après avoir fini d’user la précédente sous les rayons ardents du soleil africain.

Nouvelle GV de la voilerie vendéenne "Tarot voiles"


Nous allions pouvoir l’étrenner lors notre prochaine navigation vers la Gambie,

Le 20 avril 2022, l’équipage et le bateau étaient prêts à reprendre la mer…




Infos pratiques pour les navigateurs


FORMALITÉS

Formalités d’entrée : voir précédent article

Formalités de sortie : tampon de l’immigration obtenu rapidement et gratuitement auprès de la Police Aux Frontières d’Elinkine (PAF)

Pour vous assurer les bonnes grâces de la PAF, nous vous recommandons de vous y arrêter lorsque vous arrivez en Casamance pour signaler votre présence. A priori, ce n’est pas obligatoire mais cela semble apprécié.


En Casamance, ne vous arrêtez pas avec votre voilier devant Karabane ou Ziguinchor si vous voulez éviter de payer une taxe de navigation exorbitante (100 000 francs CFA minimum) que seuls les capitaines de port sont habilités à vous réclamer. Bien qu’il existe un texte de loi relatif à cette taxe, il semble qu’elle ne soit pas très «officiellement» collectée.


NAVIGATION

Météo

Lors de notre séjour entre le 19 mars et le 20 avril 2022, nous avons eu une météo très stable, un vent régulier de NO à NE, et n’avons jamais souffert de la chaleur.

Difficultés

Les deux principales difficultés proviennent :

  • des profondeurs des bolongs et des bancs de sable qui s’y déplacent.

  • des nombreux pêcheurs et dispositifs de pêche éparpillés sur le fleuve. Il faut être vigilant en permanence et une bonne paire de jumelles est une aide précieuse pour repérer au loin d’éventuels obstacles ou comprendre ce que le pêcheur est en train de faire.

Les deux passes (celle du Saloum et celle de la Casamance) sont parfaitement balisées (néanmoins nous n’avons pas testé leur éclairage de nuit) et si vous les empruntez de jour avec les bonnes conditions de houle et le bon courant de marée, cela ne représente pas de difficultés particulières (soyez quand même toujours vigilants à la présence de casiers ou filets le long de la passe et parfois légèrement à l’intérieur). Nous avons observé dans le Saloum comme dans la Casamance un décalage assez important entre la marée et le courant de marée (jusqu’à +2h pour le courant).


Outils

Nous avons navigué avec :

  • Open CPN

  • Isailor (cartographie TX 97)

Les deux ne sont pas du tout précis pour les bolongs. Il faut se servir en complément de Google Earth.

  • Le guide "Cruising Guide to West Africa" de Steve Jones. Bien que daté, il donne de nombreuses informations utiles.


AVITAILLEMENT

Nous n’avons pas trouvé beaucoup de sources d’avitaillement en produits frais (fruits-légumes-œufs) dans le Saloum. Nous avons pu acheter tout de même quelques légumes à Foundiougne et quelques fruits à Djiffer.

Il vaut mieux prévoir un bon avitaillement à Dakar (marché Castor) avant de partir.

En Casamance, nous avons trouvé pas mal de produits frais et secs (cacahuètes, riz, bissap, … ) à Elinkine.


Pour l’eau nous avons bidonné dans les campements où nous sommes passés en Casamance.


Gasoile : Nous n’avons pas eu à en faire mais nous aurions sans doute pu remplir quelques bidons à Elinkine (Casamance)


DIVERS

Paludisme : nous avions prévu un traitement antipaludique pour notre séjour au Sénégal (Malarone) mais nous avons eu tellement peu de moustiques que nous l’avons arrêté avant la fin. (Par contre, on l’a repris en Gambie où on a eu beaucoup plus de moustiques - cf article suivant)


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4件のコメント


Arnaud Cazenave de la Roche
Arnaud Cazenave de la Roche
2022年5月13日

C’est un vrai plaisir de suivre vos aventures, Mathilde ! Tu as l’art de les écrire de façon subtile et captivante. Il faudra que tu regroupes ces textes et que tu les publies à votre retour !

Je vous souhaite bon vent pour la poursuite de votre voyage et on attend ton prochain article avec impatience !


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Leanis Leanis
Leanis Leanis
2022年5月11日

super comme d’habitude

la rencontre et l accueil des ce village c est vraiment cela la magie des voyages

bisous les copains


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dubois.hubert
dubois.hubert
2022年5月11日

QUEL plaisir de lire et de suivre l épopée merveilleuse de nos deux navigateurs c est assez poignant de suivre vos déplacements si bien expliqués que l on ressent à certain moments l inquiétude et le plaisir de la découverte qui s entremêle

Gros bisous les amis

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emmanuel alis
emmanuel alis
2022年5月10日

Je trouve votre aventure très formidable dans ce pays où j'aurais voulu retourner car c'est dans un village en amont de St Louis sur le fleuve Sénégal que j'ai appris à marcher

en 1938. et j'aurais aimé que Julien y soit affecté mais c'est la Guadeloupe qui l'a absorbé.

Magnifiques photos et reportages d'une grande reporter. Bises à vous deux depuis P.Vendres. Emmanuel alis.

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